Aux yeux d’Audrey, chaque minute passée chez ses amis était riche de
mille joies. Elle allait de promener sur la plage, s’amusait avec les enfants,
flemmardait au soleil en compagnie de Violet et surtout échangeait des
confidences avec elles. Elle avait l’impression d’avoir trouvé en Violet cette
fameuse sœur ainée manquée pendant sa jeunesse alors qu’elle était sans cesse
obligée de prendre des décisions sans pouvoir demander conseil à qui que ce
soit. La présence de Violet la sécurisait et elle n’avait plus de secret pour
elle. Quant à James, c’était un gentlemen
jusqu’au bout des ongles et Audrey appréciait la camaraderie fraternelle
qui s’était vite instauré entre eux.
-
Que vas-tu faire lorsque tu
rentreras à San Francisco ? lui demanda Violet un jour où elle se trouvait
toutes les deux seules sur la plage.
Elle avait bien du mal à imaginer qu’Audrey puisse mener à nouveau la
vie qui était sienne avant son départ des états- unis et aurait aimé qu’elle
accepte de venir vivre à Londres avec eux comme elle le lui avait déjà proposé
à plusieurs reprises.
-
La même chose qu’avant,
j’imagine… répondit celle-ci. M’occuper de la maison de mon grand-père et
donner un coup de main à Annabelle.
Mais sa voix manquait de conviction. […]
James venait les rejoindre sur la plage. Mais il n’était pas seul. Un
homme de haute taille, aussi brun que lui, l’accompagnait et ils semblaient
tous deux très absorbés par leur discussion.
-
Il s’agit de l’écrivain et
explorateur Charles Parker-Scott, expliqua Violet. Son nom ne doit pas t’être
inconnu car la plupart de ses livres ont été publiés aux Etats-Unis… Sa mère
était américaine d’ailleurs.
Charles Parker-Scott… En effet, Audrey se souvenait d’avoir lu deux de
ses récits de voyage lorsqu’elle vivait encore à San Francisco. Mais comment un
homme qui, à en croire ses livres, avait voyagé autant et aussi loin, pouvait
être aussi jeune ?
Elle allait poser la question à Violet quand celle-ci bondissant sous
ses pieds , se précipita dans les bras du nouveau venu.
-
Au cas où tu l’aurais
oublié, je te rappelle que tu es mariée, Vi ! fit remarquer James en
riant.
-
Fiche-moi la paix,
James ! Avec Charles, je ne risque rien ; ce n’est pas un homme comme
les autres…
-
Pas comme les autres !
répéta l’intéressé, en prenant un air faussement courroucé. Que veux –tu dire
par là ?
Il s’était reculé si brusquement que Violet, perdant l’équilibre, alla
s’affaler dans le sable à ses pieds.
-
Tout simplement que pour
moi tu fais partie de la famille, répondit Violet avec son aplomb habituel.
Cette réponse parut le satisfaire et il s’installa sur le sable à coté
d’elle pour lui demander :
-
Quelles sont les dernières
nouvelles, Lady Vi ?
-
Il fait un temps
merveilleux et les Murphy se sont surpassés lors de leur dernier bal masqué,
répondit Violet. J’ose donc espérer que tu vas rester un peu plus de
vingt-quatre heures chez nous…
-
Je suis pratiquement libre
jusqu’à la fin de la semaine.
« Il parle anglais avec un accent
américain », se dit Audrey qui observait le nouveau venu. De plus Charles
Parker-Scott n’avait pas du tout le type anglo-saxon : brun, le teint mat,
mince au point de paraître presque maigre, il aurait très bien pu passer pour
un Espagnol ou un Italien… « On dirait un prince italien, songea Audrey,
frappée par la finesse aristocratique de ses amis. Ou quelques Condottiere… »
Question carrure, Charles n’avait en effet rien à envier à James.
-
Si ma chère épouse en a terminé avec toi,
intervint James, je vais peut-être pouvoir te présenter notre amie Audrey
Driscoll qui vient de Californie.
Charles se leva aussitôt pour serrer la main d’Audrey et il lui adressa
un sourire éblouissant auquel bien peu de femme devaient pouvoir résister.
C’est en tout cas ce que se dit Audrey.
-
Non seulement Charlie est
beau comme un dieu, mais il ne s’en rend pas compte, lui expliqua Violet un peu plus tard.
Habillées toutes les deux de robes en soie blanche qui mettait en valeur
leur bronzage, elles étaient installées sur la terrasse de la maison et
buvaient du champagne en attendant le retour de James et de Charles qui étaient
partis se promener sur la plage.
-
Une fois, je lui ai parlé
de son charme ravageur, continua Violet, et je me suis aperçue que cela le
laissait complètement froid. Etonnant, non ? Je jurerais que la plupart
des femmes qu’il rencontre sont prêtes à lui tomber dans les bras mais il ne
les voit pas… Il ne pense qu’à ses livres, ma pauvre Audrey !
Cet aspect de la personnalité de Charles plaisait tout particulièrement
à Audrey. Un peu plus tôt dans l’après-midi, elle avait eu l’occasion de
discuter avec lui de ses livres et elle lui avait avoué que l’un de ses auteurs
préférés était Nicole Smith. Charles avait été ravi car lui aussi adorait les
récits de voyage de cet écrivain.
Danielle STEEL : La
vagabonde
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