En cet après-midi du 7 juillet, les
représentants des taluqdars et des rajahs, le haut commandement militaire ainsi
que le gouvernement au grand militaire ainsi que le gouvernement au grand
complet, sont réunis dans le palais de Chaulakhi, à proximité de Kaisarbagh, où
la régente a choisi de s’installer avec son fils.
On attend la nouvelle régente avec scepticisme et un certain agacement,
le rajah Jai Lal ayant fait savoir que celle-ci tenait à participer à chacune
des décisions concernant la lutte contre l’occupant et l’administration du
pays. Mais il a jugé préférable de ne pas rapporter ses paroles exactes : «
Si ces honorables saheban s’imaginent que je serai une marionnette se
contentant d’enregistrer leurs décisions, ils se trompent, lui avait-elle
déclaré. Depuis longtemps j’observe la gestion du royaume, j’en ai constaté les
nombreuses erreurs, et non du seul fait des Britanniques ! Nos propres
conseiller font trop souvent passer leurs intérêts avant ceux du pays, je n’aurais
aucune indulgence. »
A 16 heures précises, la Rajmata est entrée, précédée de ses gardes
turques dans leur uniforme vert foncé. Somptueusement vêtue d’une garara tissée
d’or et rehaussée de perles, elle avance lentement, non plus enveloppée de ses
voiles, comme au jour du couronnement où elle s’était montrée au peuple
rassemblé, mais le visage découvert, une légère gaze dissimulant ses cheveux
ramenés en torsade. Elle entend aussi signifier que ce n’est pas la femme qui
préside ces séances de travail mais la régente, chef du gouvernement, et que le purdah n’a donc pas lieu d’être.
Les hommes réunis ne s’y trompent pas qui, au début choqué mais surtout
troublés par sa beauté, n’osent lever les yeux sur elle. Pourtant à ses
questions précises sur tel ou tel point de l’ordre du jour, il faut bien qu’ils
répondent, et peu à peu ils vont se ressaisir.
Kenizé Mourad, Dans la
ville d’or et d’argent ( p 243, 244, 245 )
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