dimanche 31 mars 2013

La porte



"Lorsqu'une porte du bonheur se ferme, une autre s'ouvre; mais parfois on observe si longtemps celle qui est fermée qu'on ne voit pas celle qui vient de s'ouvrir à nous." 
                        Helen Keller

samedi 30 mars 2013

C’est l’histoire d’une amitié à l’état brut



   Il est des histoires d’hommes qui rejoignent la légende dans ce qu’elle a d’essentiel. La nôtre est essentielle parce qu’elle est simple. C’est l’histoire d’une amitié à l’état brut, qui s’implique autant que la complicité, aussi têtue que l’amour ; un tissu de tendresse enroulé autour d’une hampe de solidarité et qui, lors des bourrasques se déploie automatiquement dans le ciel et claque de tous ses pans, tel un étendard sacré. Je vous jure que l’on triomphe des pires mauvaises passes rien qu’à l’entendre ralinguer par- dessus nos têtes.
  Lorsque, dans le silence sournois de la nuit, je me surprends à dresser l’inventaire de ma chienne de vie et que nulle part je ne tombe sur un bout de satisfaction ; lorsque je me suis amenée à reconnaître l’ampleur de mes torts et de mes bévues – moi qui excellais dans l’art des complications -, j’ai alors l’excuse de cette amitié qui me sauve la mise car il n’y a pas plus lamentable guigne, plus sauvage gâchis, plus pitoyable infortune que de se faire un maximum d’ennemis et pas un seul ami. 
         Yasmina Khadra :  L'automne des chimères 

Roy Tabora


Roy Tabora, né le 18 Juin 1956, dans une famille de peintres, a grandi dans un monde où l'art était une façon de vivre. Sous l'œil vigilant d'un oncle affectueux, sa main a été habilement formée à reproduire ce que son cœur a vu. Ces débuts en tant que stagiaire dans les ateliers de son oncle et les années de formation et de discipline  qu’il avait reçu, avait produit en lui un peintre réaliste très accompli. Sa quête de l'excellence s'est poursuivie avec une éducation formelle en beaux-arts de l'Université de Hawaii. Aujourd'hui, il est reconnu comme l'un des peintres du monde et du  paysage marins.







Les grottes d'El Haouaria !


Les grottes d’El Haouaria se situent à l’extrême nord de la péninsule du Cap Bon, à 2 km du village d’El Haouaria, en bord de mer,  dans un cadre quasi stérile mais magnifique, les carrières antiques d’El Haouaria furent exploitées des siècles durant tantôt d’une manière souterraine, tantôt à ciel ouvert par les Carthaginois et les Romains.
Le site, connu également sous l’appellation arabe de Ghar el Kebir ( grande caverne).
Ce sont des carrières de pierre gréseuse exploitée dès l’époque punique aux VIIe et VIe siècles avant J.C., Cette pierre entrait, dans l’Antiquité, dans la construction des villes du littoral et de leurs principaux monuments, en particulier, la capitale : Carthage.
Le  monument  se présente sous forme d’une succession de « salles », en fait des excavations «évidées» par une étroite ouverture qui s’enfonce dans les profondeurs du gisement, en dégageant un espace de forme pyramidale.
En surface, au sommet du promontoire qui s’avance vers la mer, à côté des ouvertures qui donnent accès au gisement, il existe également des traces d’exploitation aérienne du site.
L’exploitation des grottes d’El Haouaria  a débuté au VII ème siècle avant J.Ch.  La pierre de gré a longtemps servi à la construction des monuments de Carthage la punique ensuite la romaine. Le mode d’exploitation de cette carrière était assez original et rare. La technique consistait à extraire la pierre de l’intérieur de la masse pour la faire parvenir en surface par le biais de puits de montée carrés.
                
                         Sources : www.tunisientunisie.com et  www.nabeul.inf






mercredi 27 mars 2013

Pourquoi te déguises-tu ?



Pourquoi te déguises-tu
En vent, en pierre, en oiseau ?
Pourquoi me souris-tu du ciel
Comme un éclair inattendu ?
        
Cesse de me tourmenter : Ne me touche pas !
Laisse-moi à la gravité de mes soucis…
Un feu ivre passe en vacillant
Sur les marias gris desséchés.
        
La Muse, dans sa robe trouée
Chante d’une voix traînante, monotone.
Sa force miraculeuse
Est dans son angoisse cruelle et jeune.
              Anna Akhmatova 

mardi 26 mars 2013

El Haouaria


             El Haouaria ou  Aquiaria, " pays de l'aigle" 


Les grottes d’El Haouaria se situent à l’extrême nord de la péninsule du Cap Bon, à 2 km du village d’El Haouaria, en bord de mer,  dans un cadre quasi stérile mais magnifique, les carrières antiques d’El Haouaria furent exploitées des siècles durant tantôt d’une manière souterraine, tantôt à ciel ouvert par les Carthaginois et les Romains.
Le site, connu également sous l’appellation arabe de Ghar el Kebir ( grande caverne).
Ce sont des carrières de pierre gréseuse exploitée dès l’époque punique aux VIIe et VIe siècles avant J.C., Cette pierre entrait, dans l’Antiquité, dans la construction des villes du littoral et de leurs principaux monuments, en particulier, la capitale : Carthage.
Le  monument  se présente sous forme d’une succession de « salles », en fait des excavations «évidées» par une étroite ouverture qui s’enfonce dans les profondeurs du gisement, en dégageant un espace de forme pyramidale.
En surface, au sommet du promontoire qui s’avance vers la mer, à côté des ouvertures qui donnent accès au gisement, il existe également des traces d’exploitation aérienne du site.
L’exploitation des grottes d’El Haouaria  a débuté au VII ème siècle avant J.Ch.  La pierre de gré a longtemps servi à la construction des monuments de Carthage la punique ensuite la romaine. Le mode d’exploitation de cette carrière était assez original et rare. La technique consistait à extraire la pierre de l’intérieur de la masse pour la faire parvenir en surface par le biais de puits de montée carrés.
             
              
 Sources : www.tunisientunisie.com et  www.nabeul.inf





samedi 23 mars 2013

Kerkouane

Kerkouane est l’une des plus belle cité punique du Cap Bon.



Située à mi-chemin entre Kelibia et El Haouaria, en bordure de mer, Kerkouane est  une cité punique authentique, inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO.


Kerkouane ne possède aucune trace d’une présence romaine comme ce fut le cas des autres cités tels que Carthage ou Utique.





C'est une ville fortifiée, à double muraille, peuplée par 2000 habitants environ. Son plan d’urbanisme est très élaboré. Ses rues sont droites et se croisent perpendiculairement. Elle possède un système hydraulique et des canalisations pour drainer les eaux usées. A l’entrée des demeures se trouve, dessiné au sol le symbole de la civilisation punique, représentant la déesse Tanit . Chaque maison dispose d’une salle de bain-sabot et d’un évier. Les sols sont couverts de mosaïques.






La mer de Nabeul




       Belle et propre, cette mer est éternellement séduisante !

jeudi 21 mars 2013

Je savais que j’étais né poète comme l’oiseau naît musicien


    Le blé atteignait mes épaules, pourtant j’avais faim tous les jours et j’avais faim toutes les nuits. Je ne comprenais déjà pas, mais je m’en moquais : j’avais la chance d’être un enfant.
    Lorsque le vol d’une libellule me faisait pousser des ailes et que mes éclats de rire s’égouttaient dans le clapotis des fontaines, lorsque je courais comme un fou parmi les fougères, quand bien même chaque foulée frondait mes pas, je savais que j’étais né poète comme l’oiseau naît musicien, et à l’instar de l’oiseau, il me manquait juste les mots pour le dire.
 Aujourd’hui encore, je ne comprends pas. Je marche à tâtons en pleine lumière. Mes lauriers d’affranchi ne me sont qu’œillères. Mon regard de prophète ne retrouve plus de repères. Peu  fier de l’adulte que je suis devenu, je guette ma vieillesse comme l’autre l’huissier puisque toute chose en ce monde ne me fait plus rêver.
                      
  
                  Yasmina Khadra : L’automne des chimères

Art Russe


                                  Les tableuax d'Eduard Gau

mardi 19 mars 2013

Lisez... Lisez... Lisez...




"Vous écrivez, mais vous voilà arrêtés? Lisez. Les livres vous redonnent l'inspiration. Lisez quand vous voudrez écrire; lisez quand vous saurez écrire; lisez quand vous ne pourrez plus écrire. Le talent n'est qu'une assimilation."

             Antoine Albalat: L'art d'écrire enseigné en vingt leçons


vendredi 15 mars 2013

Les fenêtres ouvraient sur un petit jardin



   Il faisait extrêmement chaud dehors ; après le déjeuner Sanine voulut se retirer, mais ses hôtes  lui dirent que par une pareille chaleur il valait beaucoup mieux ne pas bouger de sa place ; et il resta.
  Dans l’arrière-salon où il se tenait avec la famille Roselli, régnait une agréable fraîcheur: les fenêtres ouvraient sur un petit jardin planté d’acacias. Des essaims d’abeilles, des taons et des bourdons chantaient en chœur avec ivresse dans les branches touffues des arbres parsemées de fleurs d’or ; à travers les volets à demi clos et les stores baissés, ce bourdonnement incessant pénétrait dans la chambre donnant l’impression de la chaleur répandue dans l’air au dehors, et la fraîcheur de la chambre fermée et confortable paraissait d’autant plus agréable… […]
 Bientôt Sanine resta immobile à son tour, comme hypnotisé, admirant de toutes les forces de son âme le tableau que formaient cette chambre à demi-obscure où par-ci par-là rougissaient en points éclatants des roses fraîches et somptueuses qui trempaient dans des coupes antiques de couleur verte, et cette femme endormie avec les mains chastement repliées, son bon visage encadré par la blancheur neigeuse de l’oreiller et enfin ce jeune être tout entier à sa sollicitude, aussi bon, aussi pur et d’une beauté inénarrable avec des yeux noirs, profonds, remplis d’ombre, et quand même lumineux…
   Sanine se demandait où il était. Était-ce un rêve ? Un conte ? Comment se trouvait-il là.[…]
  Sanine était un fort beau garçon, de taille haute et svelte ; il avait des traits agréables, un peu flous, de petits yeux teintés de bleu exprimant une grande bonté, des cheveux dorés et une peau blanche et rose. Ce qui le distinguait de prime abord, c’était cette expression de gaieté sincère, un peu naïve, ce rire confiant, ouvert, auquel on reconnaissait autrefois à première vue les fils de la petite noblesse rurale russe. Ces fils de famille étaient d’excellents jeunes gentilshommes, nés et librement élevés dans les vastes domaines des pays de demi-steppes.
  Sanine avait une démarche indécise, une voix légèrement sifflante, et dès qu’on le regardait il répondait par un sourire d’enfant. Enfin il avait la fraîcheur et la santé ; mais le trait caractéristique de sa physionomie était la douceur, par dessus toute la douceur !
  Il ne manquait pas d’intelligence et avait appris pas mal de choses. Malgré son voyage à l’étranger, il avait conservé toute sa fraîcheur d’esprit et les sentiments qui à cette époque troublaient l’élite de la jeunesse russe, lui étaient totalement inconnus.
                              
                Ivan Sergueïevitch Tourgueniev: Eaux printanières  

Mais l’image de Gemma protégeait Sanine


  
  Marie Nicolaevna, née Kolychkine, était une femme qu’on ne pouvait s’empêcher de remarquer. Ce n’est pas qu’elle fût une beauté incontestée : on distinguait nettement en elle les traces de son origine plébéienne. Le front était bas, le nez un peu charnu et légèrement retroussé : elle ne pouvait pas se glorifier non plus de la finesse de sa peau, ni de l’élégance de ses mains et de ses pieds… mais que signifiaient ces détails ?

 Celui qui la voyait ne restait pas en contemplation devant une « beauté sacrée » comme disait le poète Pouchkine, mais devant le prestige d’un vigoureux et florissant corps de femme, russe et tzigane… et il n’y avait pas moyen de ne pas tomber en arrêt devant elle.

  Mais l’image de Gemma protégeait Sanine, comme le triple bouclier que chante le poète.

Dix minutes plus tard Maria Nicolaevna apparut de nouveau avec son mari.

  Elle s’approcha de Sanine… et sa démarche était si séduisante, que certains originaux… hélas ! Que ces temps sont loin, – devenaient follement épris de Maria Nicolaevna rien que pour sa démarche.

« Lorsque cette femme marche à ta rencontre, on dirait que le bonheur de ta vie entre par la même porte ! » disait un de ses adorateurs.

  Elle tendit la main à Sanine et lui dit de sa voix caressante et contenue :

– Vous ne vous retirerez pas avant mon retour n’est-ce pas ? Je rentrerai de bonne heure…

  Sanine s’inclina respectueusement, tandis que Maria Nicolaevna disparaissait derrière la portière ; sur le seuil elle tourna la tête en arrière et sourit, et de nouveau Sanine ressentit la même impression harmonieuse qu’il avait éprouvée un moment auparavant.

  Lorsque Maria Nicolaevna souriait, on voyait se creuser sur chacune de ses joues non pas une, mais trois petites fossettes – et ses yeux souriaient plus encore que ses lèvres, longues, empourprées et rayonnantes avec deux minuscules grains de beauté à gauche.

                 Ivan Sergueivitch Tourgueniev: Eaux printanières

mercredi 13 mars 2013

Ma princesse, le jour de tes dix huit ans !





Ma princesse, le jour de tes dix huit ans !
Voici mon bouquet de mots
Cueillis du fond de mon âme et de mon coeur.
Des mots simples et pleins d’Amour
Pour une si belle princesse !

Dix huit ans ont passé
Et te voilà enfin au seuil
De ta vie de jeune adulte.
Les chemins s’ouvrent devant toi
Suis-les…
Les voies du bonheur t’appellent
Ecoute-les…
Que ta vie soit parfumée
D’Amour, de Sérénité et d’Extase !
Que tes ambitions soient réalisées !

Ma fille, n’oublie pas tes origines !
N’oublie pas les valeurs que je t’ai apprises !
Reste modeste,
Aies  toujours confiance en toi !
Sois aimable avec tout le monde !
Aime la vie, même si elle est parfois dure.
Sois responsable de tes actes
Assume tes décisions !
N’aies pas peur d'échouer
Sois patiente sans être trop exigeante !
Sois généreuse,
Sème le bonheur, l’amour, le rire et la joie !
N’attends rien des autres
Dieu seul te récompensera…

Ma chère Princesse,
J’ai été, je suis et je serai toujours à tes côtés
Pour te protéger, te soutenir et te conseiller.
Je suis ta Maman, ton amie et ta confidente
Je partage avec toi tes joies et tes pleurs.
Je vis pour toi, 
Mon cœur ne bat qu’au rythme du tien.

Ma princesse, 
Je suis fière de toi et fière de moi !
Je prie Dieu pour que l’homme
Que la destiné t’a choisi
Soit digne de toi, te mérite et connaisse ta valeur.
Tu es la couronne de ma vie
Et L’ornement de mes espoirs…
Tu es ma vie !
             Ta MAMAN Majdouline

mardi 12 mars 2013

Je garde toujours ma porte ouverte...



Qu’il pleuve ou qu’il neige
Je garde toujours ma porte ouverte.
Que ma journée soit belle, que mes moments soient durs
Je garde toujours ma porte ouverte.
Je pose mon regard sur une branche fleurie
J’écris les mots de mes maux sur les murs garnis.
Et Je garde toujours ma porte ouverte.
Que j’entre ou que je sorte
La belle nature m’appelle,
Et aux fleurs de toutes sortes,
Je suis là, je réponds à tous vos appels. 
Je garde toujours ma porte ouverte
A l’Amour, au Bonheur et à l’Espoir.
                Majdouline Borchani

samedi 9 mars 2013

Quand on se souvient d'un ...




" Quand on se souvient d'un beau vers, d'un beau mot, d'une belle phrase, c'est toujours dans l'air qu'on les lit; on les voit devant soi, les yeux semblent les lire dans l'espace. On ne les imagine point sur le feuille où ils sont collés." ( Joseph Joubert)

Dans le triomphe de sa beauté



Le jour de la fête arriva. Mme Loisel eut un succès. Elle était plus jolie que toutes, élégante, gracieuse, souriante et folle de joie. Tous les hommes la regardaient, demandaient son nom, cherchaient à être présentés. Tous les attachés du cabinet voulaient valser avec elle. Le Ministre la remarqua.

Elle dansait avec ivresse, avec emportement, grisée par le plaisir, ne pensant plus à rien, dans le triomphe de sa beauté, dans la gloire de son succès, dans une sorte de nuage de bonheur fait de tous ces hommages, de toutes ces admirations, de tous ces désirs éveillés, de cette victoire si complète et si douce au coeur des femmes.
                 Guy de Maupassant : La parure

La mer



«  La mer ! Sa seule beauté attire, retient le regard et donne l’impression d’une étendue intouchée du commencement du monde, d’une  puissance qui dépasse l’être humain. » 
                                          Reine Malouin

vendredi 8 mars 2013

Mademoiselle Godeau


  
 Mademoiselle Godeau n'était pas tout à fait exempte de la vanité de son père, mais son bon naturel y remédiait. Elle était, dans la force du terme, ce qu'on nomme un enfant gâté. D'habitude elle parlait fort peu, et jamais on ne la voyait tenir une aiguille ; elle passait les journées à sa toilette, et les soirées sur un sofa, n'ayant pas l'air d'entendre la conversation. Pour ce qui regardait sa parure, elle était prodigieusement coquette, et son propre visage était à coup sûr ce qu'elle avait le plus considéré en ce monde. Un pli à sa collerette, une tache d'encre à son doigt, l'auraient désolée ; aussi, quand sa robe lui plaisait, rien ne saurait rendre le dernier regard qu'elle jetait sur sa glace avant de quitter sa chambre. Elle ne montrait ni goût ni aversion pour les plaisirs qu'aiment ordinairement les jeunes filles ; elle allait volontiers au bal, et elle y renonçait sans humeur, quelquefois sans motif ; le spectacle l'ennuyait, et elle s'y endormait continuellement. Quand son père, qui l'adorait, lui proposait de lui faire quelque cadeau à son choix, elle était une heure à se décider, ne pouvant se trouver un désir. Quand M. Godeau recevait ou donnait à dîner, il arrivait que Julie ne paraissait pas au salon : elle passait la soirée, pendant ce temps-là, seule dans sa chambre, en grande toilette, à se promener de long en large, son éventail à la main. Si on lui adressait un compliment, elle détournait la tête, et si on tentait de lui faire la cour, elle ne répondait que par un regard à la fois si brillant et si sérieux, qu'elle déconcertait le plus hardi. Jamais un bon mot ne l'avait fait rire ; jamais un air d'opéra, une tirade de tragédie, ne l'avaient émue ; jamais, enfin, son cœur n'avait donné signe de vie, et, en la voyant passer dans tout l'éclat de sa nonchalante beauté, on aurait pu la prendre pour une belle somnambule qui traversait ce monde en rêvant.
   Tant d'indifférence et de coquetterie ne semblait pas aisé à comprendre. Les uns disaient qu'elle n'aimait rien ; les autres, qu'elle n'aimait qu'elle-même. Un seul mot suffisait cependant pour expliquer son caractère : elle attendait. Depuis l'âge de quatorze ans, elle avait entendu répéter sans cesse que rien n'était aussi charmant qu'elle ; elle en était persuadée ; c'est pourquoi elle prenait grand soin de sa parure : en manquant de respect à sa personne, elle aurait cru commettre un sacrilège. Elle marchait, pour ainsi dire, dans sa beauté, comme un enfant dans ses habits de fête ; mais elle était bien loin de croire que cette beauté dût rester inutile ; sous son apparente insouciance se cachait une volonté secrète, inflexible, et d'autant plus forte qu'elle était mieux dissimulée. La coquetterie des femmes ordinaires, qui se dépense en œillades, en minauderies et en sourires, lui semblait une escarmouche puérile, vaine, presque méprisable. Elle se sentait en possession d'un trésor, et elle dédaignait de le hasarder au jeu pièce à pièce : il lui fallait un adversaire digne d'elle ; mais, trop habituée à voir ses désirs prévenus, elle ne cherchait pas cet adversaire ; on peut même dire davantage, elle était étonnée qu'il se fit attendre.
Depuis quatre ou cinq ans qu'elle allait dans le monde et qu'elle étalait consciencieusement ses paniers, ses falbalas et ses belles épaules, il lui paraissait inconcevable qu'elle n'eût point encore inspiré une grande passion. Si elle eût dit le fond de sa pensée, elle eût volontiers répondu à ceux qui lui faisaient des compliments : «Eh bien ! s'il est vrai que je sois si belle, que ne vous brûlez-vous la cervelle pour moi ?» Réponse que, du reste, pourraient faire bien des jeunes filles, et que plus d'une, qui ne dit rien, a au fond du cœur, quelquefois sur le bord des lèvres.
   Qu'y a-t-il, en effet, au monde, de plus impatientant pour une femme que d'être jeune, belle, riche, de se regarder dans son miroir, de se voir parée, digne en tout point de plaire, toute disposée à se laisser aimer, et de se dire : On m'admire, on me vante, tout le monde me trouve charmante, et personne ne m'aime. Ma robe est de la meilleure faiseuse, mes dentelles sont superbes, ma coiffure est irréprochable, mon visage le plus beau de la terre, ma taille fine, mon pied bien chaussé ; et tout cela ne me sert à rien qu'à aller bâiller dans le coin d'un salon ! Si un jeune homme me parle, il me traite en enfant ; si on me demande en mariage, c'est pour ma dot ; si quelqu'un me serre la main en dansant, c'est un fat de province ; dès que je parais quelque part, j'excite un murmure d'admiration, mais personne ne me dit, à moi seule, un mot qui me fasse battre le cœur. J'entends des impertinents qui me louent tout haut, à deux pas de moi, et pas un regard modeste et sincère ne cherche le mien. Je porte une âme ardente, pleine de vie, et je ne suis, à tout prendre, qu'une jolie poupée qu'on promène, qu'on fait sauter au bal, qu'une gouvernante habille le matin et décoiffe le soir, pour recommencer le lendemain.
   Voilà ce que mademoiselle Godeau s'était dit bien des fois à elle-même, et il y avait de certains jours où cette pensée lui inspirait un si sombre ennui, qu'elle restait muette et presque immobile une journée entière. 
                           Alfred de Musset :  Croisilles 


Les parfums ont plus d'une ressemblance avec l'amour


  
  Les fleurs qui tombent du sein d'une jolie femme, en Europe comme en Orient, ne sont jamais muettes ; quand elles ne raconteraient que ce qu'elles ont vu, lorsqu'elles reposaient sur une belle gorge, ce serait assez pour un amoureux, et elles le racontent en effet. Les parfums ont plus d'une ressemblance avec l'amour, et il y a même des gens qui pensent que l'amour n'est qu'une sorte de parfum ; il est vrai que la fleur qui l'exhale est la plus belle de la création.
                     Alfred de Musset :  Croisilles 

mercredi 6 mars 2013

La femme trésor



" Une belle femme plaît aux yeux, une bonne femme plaît au cœur ; l'une est un bijou, l'autre un trésor." (Napoléon Bonaparte)